Léon Blum et son piano
Léon Blum et son piano
Dans son ouvrage « Je cherche les traces de ma mère, chroniques des archives » paru aux éditions Autrement, Caroline Piketty évoque la découverte de la lettre de Léon Blum :
Sur un papier à en-tête du « Populaire », organe central du parti socialiste (SFIO), une lettre autographe attire l’attention de l’un des jeunes de mon équipe cosmopolite :
Cette lettre manuscrite est conservée aux Archives nationales sous la cote AJ/38/5944.
Contenu de la lettre de Léon Blum :
« Monsieur, j’ai reçu vendredi matin la lettre adressée 17 rue de Vaugirard par laquelle vous m’invitez à faire prendre demain matin le piano Bechstein qui se trouve au Palais de Tokyo. D’une part il m’a été impossible de prendre pendant ces trois jours de fête les dispositions nécessaires pour le transport. D’autre part je ne possède aucune des pièces justificatives dont j’entends parler pour la première fois et qu’il m’est impossible de me procurer.
Je n’ai jamais eu entre les mains la facture de ce piano qui était un présent de noces. Le nom de l’accordeur m’est inconnu et je ne vois pas le moyen de le retrouver. La concierge actuelle du 25 quai de Bourbon n’est entrée en service qu’après le déménagement de mes meubles par les autorités occupantes – déménagement qui lui me paraît suffisamment notoire.
Tout ce que je puis vous offrir est une attestation de deux bonnes qui me servaient et qui habitent toutes deux à Paris, et la police d’assurance sur laquelle le piano est certainement mentionné. Je n’ai plus cette police, tous mes papiers ayant disparu. Mais elle est retrouvable chez l’assureur, je suppose. Je ne possédait pas le numéro de mon piano et il n’y a pas eu d’identification certaine. Je tiens à vous le rappeler.
Le piano qui se trouve à Tokyo était le seul qui répondit au point de vue de la caisse et de la nature et de la couleur du bois à la description que j’avais fournie. Ce n’est pas à moi de décider si cette présomption suffit pour une restitution. Recevez, Monsieur, mes compliments empressés. «
« Sur un papier à en-tête du « Populaire », organe central du parti socialiste (SFIO), une lettre autographe attire l’attention de l’un des jeunes de l’équipe cosmopolite de Caroline Pike
Cette lettre est conservée aux Archives nationales sous la cote AJ/38/5944.
Contenu de la lettre de Léon Blum :
« Monsieur, j’ai reçu vendredi matin la lettre adressée 17 rue de Vaugirard par laquelle vous m’invitez à faire prendre demain matin le piano Bechstein qui se trouve au Palais de Tokyo. D’une part il m’a été impossible de prendre pendant ces trois jours de fête les dispositions nécessaires pour le transport. D’autre part je ne possède aucune des pièces justificatives dont j’entends parler pour la première fois et qu’il m’est impossible de me procurer.
Je n’ai jamais eu entre les mains la facture de ce piano qui était un présent de noces. Le nom de l’accordeur m’est inconnu et je ne vois pas le moyen de le retrouver. La concierge actuelle du 25 quai de Bourbon n’est entrée en service qu’après le déménagement de mes meubles par les autorités occupantes – déménagement qui lui me paraît suffisamment notoire.
Tout ce que je puis vous offrir est une attestation de deux bonnes qui me servaient et qui habitent toutes deux à Paris, et la police d’assurance sur laquelle le piano est certainement mentionné. Je n’ai plus cette police, tous mes papiers ayant disparu. Mais elle est retrouvable chez l’assureur, je suppose. Je ne possédait pas le numéro de mon piano et il n’y a pas eu d’identification certaine. Je tiens à vous le rappeler.
Le piano qui se trouve à Tokyo était le seul qui répondit au point de vue de la caisse et de la nature et de la couleur du bois à la description que j’avais fournie. Ce n’est pas à moi de décider si cette présomption suffit pour une restitution. Recevez, Monsieur, mes compliments empressés. «
Mission d’étude sur la spoliation des juifs de France
De 1997 à 2ooo, Caroline Piketty a travaillé au sein de la Mission d’étude sur la spoliation des juifs de France, mieux connue sous le nom de mission Mattéoli.
Après les résultats de celle-ci, ceux qui sont venus la voir aux Archives nationales pour leur famille spoliée ou exterminée sous l’Occupation énonçaient avec pudeur et émotion des mots semblant émerger après de longues années d’un deuil lourd à porter et à assumer.
En 42 « chroniques », l’auteur nous fait vivre cette expérience, partager ces émotions et cette mémoire. L’Occupation, mais pas seulement: c’est le monde infini des archives que l’on entrevoit, chaque question de visiteur vous transportant sur un continent différent, de la littérature libertine du XVIIe siècle à la rue des Rosiers en 1942. Dévoilant avec pudeur et justesse des tranches de vie d’hier ou d’aujourd’hui, Caroline Piketty nous fait partager son métier d’archiviste, accompagnatrice de ses interlocuteurs dans leur quête d’un passé toujours présent.
11 avril 1945, le journal Combat annonce :
« Le recensement des pianos volés par les Allemands et l’inventaire de ceux qu’ils abandonnèrent prennent fin le 25 avril. Pour faciliter et hâter les restitutions éventuelles, des dépossédés doivent préparer toutes justifications et envoyer une description de leur piano avec indication de la marque et numéro si possible au Service des restitutions, 17, rue Notre-Dame-des-Victoires, Paris (2e). »